Effondrement et dolines
Les phénomènes d’effondrement et de tassement surviennent quand du calcaire, du gypse ou de la roche salifère sont attaqués et partiellement dissous ou érodés par des circulations d’eau. Les cavités créées peuvent s'effondrer et conduire à un affaissement progressif ou à un effondrement subit de la surface du terrain. Ce phénomène touche le plus souvent les régions karstiques du Jura, des Préalpes et de certaines parties des Alpes (par ex. les Hautes Alpes calcaires dans le nord du Valais), ainsi que les dolomies et calcaires dans le sud des Alpes. En plus des causes naturelles comme de fortes pluies ou une fonte intense de la neige, les activités de construction (vibrations, charge supplémentaire) et anthropiques (fuites au niveau des conduites d'eau potable et d’eaux usées ou sondes géothermiques) peuvent favoriser la formation de cavités ou déclencher un effondrement.
Objectif de protection recommandé : le bâtiment reste intact jusqu’à un événement tricentennal et protège les personnes se trouvant à l’intérieur.
Karst : Paysage de calcaire lixivié par l’eau circulant sous terre et souvent nu à la surface. Il se caractérise par des rangées d’entonnoirs de dolines, des champs de lapiaz et généralement des vallées sèches sans réseau hydraulique en surface.
Doline (aussi appelée effondrement de terrain) : Il s'agit d'une dépression à la surface du terrain, le plus souvent en forme d’entonnoir, qui apparaît en raison de l'effondrement d’une cavité dans le sous-sol. Les dolines surviennent exclusivement dans les régions karstiques.
Affaissement : Dans le contexte des dolines, ce terme utilisé de manière très diverse se différencie clairement des tassements de sol qui peuvent par exemple survenir en raison de la nature défavorable du terrain. Il implique un lent processus d'enfoncement ou d'altération des couches supérieures du sol en conséquence directe ou indirecte de la formation de cavités dans le sous-sol.
Érosion souterraine : Altération chimique et dégradation de roches facilement solubles en raison des effets de l’eau. Il peut notamment s'agir de calcaire, de marne, d’anhydrite, de dolomite, de gypse, de sel ou de cargneule.
Solubilité : La masse de roche soluble par litre d’eau. Les valeurs typiques (à pression et température ambiante) sont de 0,013 g/l pour le calcaire, 2,04 g/l pour le gypse et 356 g/l pour l’anhydrite. Dans les roches salifères et le gypse en particulier, la formation de cavités peut progresser très vite si la quantité d’eau requise est disponible.
Doline de dissolution : La surface calcaire fissurée et karstifiée absorbe l'eau de pluie et la guide en profondeur par des zones d’infiltration et des plans de fracturation privilégiées. Les fissures et cavités s’élargissent alors en raison de la dissolution de matériau entre la surface et le sous-sol. Par conséquent, la surface du sol continue progressivement de s’affaisser et laisse une doline en forme d’entonnoir. Perte : Cas spécial de doline de dissolution qui disparaît dans un ruisseau.
Doline de suffosion : Quand du calcaire est recouvert de terrain meuble, des cavités se forment à l’interface sol – roche (toit du rocher) en raison de processus de dissolution. Si le terrain de couverture cède progressivement, une cavité caractéristique de plus en plus grande se forme.
Doline de suffosion : Quand du calcaire est recouvert de terrain meuble, des cavités se forment à l’interface sol – roche (toit du rocher) en raison de processus de dissolution. Si le terrain de couverture cède progressivement, une cavité caractéristique de plus en plus grande se forme.
Doline d'effondrement : La solubilité accrue de la roche due à la lixiviation souterraine amoindrit la portance du sous-sol. Ensuite, un effondrement très subit (effondrement de terrain) peut survenir à la surface du sol.
Les dolines peuvent présenter des tailles et des proportions diverses et s’agrandissent en permanence au fil du temps. Souvent, plusieurs dolines sont proches les unes des autres ou forment une chaîne, le long de cours d'eau souterrains ou de zones de transition et de ruptures dans la roche. On le constate facilement au moyen d'un modèle numérique du terrain, comme le montre l’extrait de carte suivant de la zone au sud du Soliat (VD).
Les problèmes de stabilité en lien avec les dolines se limitent aux régions de roches calcaires à potentiel karstique. Elles sont indiquées sur la carte du karst (source : www.isska.ch) et sur les cartes géologiques. Sont potentiellement menacées les régions dans lesquelles des roches dures à potentiel karstique sont recouvertes uniquement d'une couche peu épaisse ou instable de sédiments quaternaires.
L’évaluation du danger devrait aussi englober la zone à proximité directe d’une doline afin d'assurer une protection à titre préventif contre les instabilités en bordure de cette doline. Dans les zones comprenant plusieurs dolines, ces dernières s’inscrivent généralement au sein d’une vaste zone de danger.
Selon OFEV 2016 les degrés d’intensité sont délimités comme suit :
- Présence possible de dolines ou roche soluble -> intensité faible
- Présence avérée de dolines -> intensité moyenne
- Présence de dolines et danger d’effondrement avérés -> intensité forte
Les signes de formation de karst à la surface, les zones locales d’infiltration et les perturbations et le dérangement structural de la géologie constituent des facteurs aggravants. Des drainages ou un recouvrement très important et très résistant avec du matériau meuble (par ex. moraine) permettent de diminuer le risque d’effondrement. En plus des causes naturelles comme de fortes pluies ou une fonte intense de la neige, les activités de construction (vibrations, charge supplémentaire) et anthropiques (fuites au niveau des conduites d'eau potable et d’eaux usées ou sondes géothermiques) peuvent déclencher un effondrement.
Pour pouvoir dimensionner les mesures de protection du bâtiment en cas de tassement ou d'effondrement, il faut connaître la profondeur d'effondrement (hs), la surface d'effondrement (AE, AE,g) et le diamètre maximal (Dmax). Si la doline a été comblée, il faut connaître les matériaux de comblement (terrains meubles, limons, argiles, etc.).
En général, les informations figurant sur les cartes d’intensité et les cartes de dangers ne suffisent pas à déterminer avec certitude le danger lié aux dolines à un endroit précis. Pour cela, un spécialiste (géologue ou géotechnicien) doit établir une expertise spécifique qui analyse précisément les caractéristiques du sol et les causes possibles de tassement ou d’effondrement. Il est surtout important de ne pas examiner uniquement la stabilité du terrain à bâtir à proximité immédiate, mais également sa géologie souterraine.
Notations
hs [mm]: | Hauteur de l’effondrement ou du tassement du sol |
he [m]: | Profondeur des fondations |
vv [mm/Jahr]: | Vitesse de tassement (phénomènes permanentes) |
AE [m2]: | Superficie de l’entonnoir d’effondrement ou d’affaissement |
AE,g [m2]: | Superficie de la zone effondrée située dans le périmètre de la surface au sol |
Ag [m2]: | Surface au sol du bâtiment |
Dmax [m]: | Diamètre maximal |
Situation de danger 1 : Affaissement sur une petite surface, effondrement local
Seule une petite part de la surface au sol du bâtiment est concernée par l’affaissement ou l’effondrement. En fonction de la rigidité de la structure du bâtiment et de son type de fondations, de petits tassements de la partie de bâtiment concernée peuvent survenir. En règle générale, la stabilité structurelle est menacée localement, mais la stabilité d'ensemble reste garantie.
Situation de danger 2 : Affaissement sur une grande surface, vaste effondrement
Une part importante de la surface au sol du bâtiment est concernée par l'affaissement ou l’effondrement. La stabilité globale du bâtiment n’est donc plus garantie. Le bâtiment peut s’incliner ou se fissurer selon le type de fondations et le concept statique de la construction. Un danger d’effondrement implique toujours également un danger de mort pour les personnes.
Les tassements et les effondrements engendrent des variations de la pression des terres, de la pression hydrostatique et des déformations sur l'ouvrage. En général, les informations qui figurent sur les cartes des dangers et des intensités ne suffisent pas pour dimensionner les mesures de protection des bâtiments. Celles-ci doivent être déterminées sur la base d’une expertise du sol de fondation et d’une appréciation géotechnique adaptées à l’ouvrage traité et prenant en compte la géologie locale. Les effets générés par les tassements et par les effondrements ne peuvent pas être exprimés directement au moyen de valeurs normalisées. Ils doivent être déterminés, conformément aux conditions locales, en appliquant les règles de l’art du calcul des fondations.
Trois approches s’offrent au spécialiste en géotechnique pour mesurer les effets : différentes investigations de terrain permettent de déterminer la position et l’étendue des cavités, la profondeur des plans d’instabilité déjà formées, la compacité du terrain, les paramètres relatifs aux eaux souterraines, et la vitesse des déformations. Les méthodes géophysiques sont très adaptées. Il s’agît d’investigations non destructives qui permettent de restituer une image à deux ou trois dimension du sous-sol et de ses caractéristiques hydrogéologiques. Des essais de laboratoire à partir d’échantillons prélevés sur du matériau meuble ou de la roche permettent d’analyser la densité, la résistance au cisaillement, la cohésion et le module d’élasticité du matériau. On peut calculer les effets en introduisant ces paramètres, ainsi que des données concernant la topographie locale, dans un modèle numérique. Ces modèles permettent en outre de contrôler l’efficacité des mesures envisageables pour protéger les objets.
Des mouvements ou tassements différentiels du sous-sol peuvent nuire à la stabilité des bâtiments même s’ils se produisent de manière lente et continue. On rencontre fréquemment un enfoncement ou une inclinaison de certaines parties de bâtiment et la formation de fissures dans les parois et les plafonds. Les portes et les fenêtres deviennent rapidement inutilisables, des conduites peuvent se rompre et les voies d’accès peuvent subir des dommages. En fonction du degré de dommages, la capacité portante du bâtiment peut être remise en question en plus de son aptitude au service, mettant fortement en danger les personnes. Les réparations sont souvent très coûteuses et compliquées, et ne présentent qu'une efficacité à court terme si le processus d'affaissement n’est pas stabilisé.
Dans des cas extrêmes, le bâtiment entier ou des parties de bâtiment s'effondrent ou s’affaissent subitement. Dans cette situation, les personnes et les animaux dans le bâtiment et autour de celui-ci sont en grand danger. Souvent, les dommages structurels et le danger résiduel d'effondrement sont si graves qu’aucune réparation ni reconstruction au même endroit n'est possible moyennant des efforts proportionnés. Il est essentiel de pouvoir prévenir cette situation, mais aussi de pouvoir évacuer à temps.
Pour contribuer de la manière la plus efficace à réduire le risque, il faut choisir un emplacement le plus sûr possible pour le bâtiment, car en construisant sur une doline qui devient de plus en plus profonde ou qui a été comblée, on doit s'attendre à ce que le sol soit moins stable. Consultez la carte du karst ou une carte géologique et renseignez-vous pour savoir si les environs sont connus pour abriter des cavités ou des dolines. Dans les zones de danger potentiel, engagez toujours un géologue ou un géotechnicien afin de connaître au mieux l'ampleur du processus d'affaissement et ses causes. Choisissez un mode de construction adapté et renforcé. Limitez aussi à un minimum le potentiel de déstabilisation du sol durant la construction et l’exploitation.
Propositions de concepts et de mesures de protection pour les différentes parties du bâtiment :
Egli, Th. (2005): Recommandations - Protection des objets contre les dangers naturels gravitationnels. Association des établissements cantonaux d'assurance incendie, Berne.
OFEV ( 2016): Protection contre les dangers dus aux mouvements de terrain. Aide à l’exécution concernant la gestion des dangers dus aux glissements de terrain, aux chutes de pierres et aux coulées de boue. Office fédéral de l’environnement, Berne. L’environnement pratique n° 1608: 98 p.
OFROU (2012): Dangers naturels sur les routes nationales : Concept de risque. Méthodologie basée sur les risques pour l’évaluation, la préven-tion et la maîtrise des dangers naturels gravitationnels sur les routes nationales, Office fédéral des routes, Berne.
PLANAT (2011): Concept de risque appliqué aux dangers naturels. Plate-forme nationale "Dangers Naturels", Berne.
Fondation de prévention des établissements cantonaux d'assurance (2014): Prevent-Building – une méthode et un outil d’évaluation de l’efficacité, de la rentabilité et de l’acceptabilité des mesures de protection des bâtiments, destinés à parer aux risques naturels gravitationnels et météorologiques. Rapport concernant la phase 1 incluant les adaptations de la phase 2. Groupe de travail Prevent-Building: WSL-Institut pour l'étude de la neige et des avalanches SLF, Egli Engineering AG, Geotest SA, B,S,S. Volkswirtschaftliche Beratung, Version 12.05.2014. (Download)
Suda J. und Rudolf-Miklau F. (Hrsg.) (2012): Bauen und Naturgefahren, Handbuch für konstruktiven Gebäudeschutz. Springer, Wien.
Arbeitsgruppe Geologie und Naturgefahren (1998): Geologische Naturgefahren in der Schweiz. Separatdruck aus: Bulletin für angewandte Geologie 3/1, ISSN 1420-6846.
Lang, H.-J. et al. (2010): Bodenmechanik und Grundbau. Das Verhalten von Böden und Fels und die wichtigsten grundbaulichen Konzepte, 9. bearbeitete Auflage, Springer Verlag, Berlin.
ISSKA (2017): Les Dolines -Processus de formation, Fonctions et conservation, Conseils pratiques. Institut Suisse de Spéléologie et de Karstologie, La Chaux-de-Fonds.
Smoltczyk, U. [Hrsg.] (2009): Grundbau Taschenbuch, 7. Auflage,. Teil 1, Geotechnische Grundlagen, Ernst und Sohn, Berlin.
Smoltczyk, U. [Hrsg.] (2009): Grundbau Taschenbuch, 7. Auflage, Teil 3, Gründungen und geotechnische Bauwerke, Ernst und Sohn, Berlin.